Apollo Day à la Cité de l’Espace.
La Cité de l’Espace a célébré les 50 ans du « premier pas d’un homme sur la Lune », à cette occasion, Esprit Joaillerie a eu le grand privilège de s’entretenir avec Claudie Haigneré, Première femme européenne astronaute, Matthias Maurer, astronaute et géologue en préparation pour la prochaine mission lunaire et Sylvestre Maurice, astrophysicien, planétologue et inventeur de la plus célèbre caméra laser « ChemCam » qui est actuellement sur Mars.
Sylvestre Maurice, quel type de roche a t-on découvert sur la Lune ?
Tout d’abord il faut dire que « La surface de la Lune est appelé Régolithe. C’est une couche de poussière et de roches d’environ 6 mètres d’épaisseur.
De plus, comme la Lune n’a pas d’atmosphère, tous les corps qui vont dans sa direction y entrent en contact à très grande vitesse et fracturent le sol. Ce grain fin résultant de la fracturation dû aux impacts est aussi impacté par le vent solaire. Il dépose de l’hydrogène et de l’helium, « viellissant » un peu plus la roche en la rendant plus sombre. On a trouvé beaucoup d’oxyde, d’aluminium, de calcium, et plus précisément en minéralogie des phases minérales comme les Silicates, les Pyroxènes, Dioxides, Olivines et Feldspaths…
Il y a peu de quartz, mais des Oxydes comme l’Ilmenite (FeTiO3) et l’Apatites (Ca5(PO4)3(F,OH,Cl)).
C’est une minéralogie trés semblable à la Terre mais avec un spectre plus restreint. Pour continuer ces études de roches lunaires et mieux comprendre le sol lunaire, nous avons la chance d’avoir un trésor, les 382 kgs d’échantillon de Régolithe d’Apollo et les 1 kg des missions Luna, et bientôt, à la fin de l’année des échantillons chinois de Chang’e 5. On analyse également le sol en orbite lunaire à environ 30 km d’altitude par spectrométrie jusqu’à l’infrarouge mais rien ne vaut les échantillons. »
Y a t il une pierre Lunaire qui a retenue votre attention ?
« Mais oui ! Cette année nous avons fait une belle découverte dans les échantillons lunaires, une météorite terrestre !
C’est probablement la pierre la plus vieille provenant de la Terre. Elle résulte d’un fort impact qui a eu lieu sur Terre, il y a environ 3,7 milliards d’années et a été éjectée vers la Lune, c’est une pierre qu’on ne pourrait pas trouver sur terre car il y a trop d’érosion. »
Pouvez-vous me parler un peu du sol martien?
« Depuis 2012, l’homme est sur Mars grâce à Curiosity et au Laser « ChemCam » réalisé en France. Nous avons donc pu analyser les roches martiennes, à chaque tir laser, nous avons la proportion de fer, d’aluminium, de silicium, d’oxygène.. »
Quelle a été la première roche martienne analysée par ChemCam?
« Coronation est la première roche martienne que nous avons analysée 13 sol après s’être posé sur Mars (19 Aout 2012), moment impressionnant car c’était la première fois que nous avions, à une aussi longue distance, la composition exacte d’une roche, du basalte.
Ce laser pourra nous dire comment sont associés entre eux les minéraux sur Mars, les phases minérales le Carbonate, Silicate, Quartz…
Ce laser vert fait vibrer les molécules, il est accompagné d’un spectromètre. »
Avez-vous une belle histoire de pierre martienne à nous raconter?
« Imaginez une météorite martienne qui sous un impact quitte Mars, dérive lentement dans l’espace jusqu’à tomber sur Terre. Cette météorite Martienne est à la Cité de l’Espace à Toulouse, c’est Luc Labenne, chasseur de météorites, qui l’a cueilli et nous l’a apporté.
Et bien cette météorite, je l’ai confié à Thomas Pesquet, qui l’a emporté sur ISS puis Thomas l’a rapporté sur Terre.
Nous l’avons scindée en trois parties.
Une partie repartira sur Mars avec SuperCam pour étalonner la nouvelle caméra, la seconde a été remise à Thomas Pesquet par la Cité de l’espace et le CNES en juin 2019 pour alimenter son rêve d’espace.
En 2020, le prochain laser « SuperCam » decollera pour Mars et sera capable de faire de la minéralogie en plus de la chimie sur Mars.
Enfin la troisième est exposé à la Cité de l’Espace avec un témoignage de Thomas Pesquet lors de sa mission dans l’espace qui explique ce que représente cette pierre pour lui; le futur de l’exploration spatiale :
la collaboration Hommes / robots.
C’est une belle histoire de pierre car elle aura traversé quatre fois l’atmosphère terrestre et deux fois l’atmosphère martienne. »
Esprit Joaillerie a poursuivi cette journée avec Matthias Maurer, Astronaute allemand de l’ESA, géologue qui fera partie de la prochaine exploration Lunaire.
Sa mission sera tournée essentiellement vers la géologie, une spécialité européenne, car pour l’instant il n’y a d’Astronaute Géologue qu’à l’ESA.
Pour mener à bien cette mission, Matthias Maurer s’entraine sur l’île de Lanzarote en Espagne où la géologie volcanique est très proche du sol lunaire, car la prochaine mission devra alunir dans un cratère gigantesque à l’abri du rayonnement cosmique et protégé des températures extrêmes de la Lune
(100 °C le jour, – 150 °C la nuit).
Ce n’est pas tout, un laboratoire géant de plus 1000 m2 à Cologne reproduit les conditions similaires à celles sur la Lune afin de construire le futur village lunaire et de mener diverses expérimentations comme fabriquer du combustible à partir de molécules d’hydrogène et d’oxygène présentent dans la Régolithe. « La Lune est un formidable livre d’histoire pour progresser dans nos recherches ».
Pour conclure cette passionnante journée, c’est Claudie Haigneré qui a confié sa vision de l’espace,
« un lieu où tout est possible ».
« La Lune est un territoire scientifique passionnant très proche de nous !
C’est aussi un enjeu éthique, la lune est une vision globale du futur. Trouver le meilleur équilibre entre des intérêts à la fois politiques, économiques, scientifiques et technologiques, au service du bien commun de l’humanité, tout en respectant les intérêts privés, permettre à tous de travailler ensemble et non pas seulement en tant que nations souveraines. »
J’ai une question un peu plus personnelle, quel souvenir gardez vous de l’Espace ?
« Merveilleux. L’état d’apesanteur est une sensation unique. Mais ce qui m’a le plus marqué c’est l’odeur de la Terre lors de mon atterrissage au Kazakstan. »
Mes très chaleureux remerciements à Claudie Haigneré, Sylvestre Maurice et Matthias Maurer pour avoir pris le temps de répondre à mes questions.
Mes remerciements à la Cité de l’Espace, particulièrement à Florence Seroussi pour l’organisation de cet événement et de ces entretiens passionnants.