Renaissance D’Or et D’Éclat, bijoux en lumière à la Fondation Bemberg
Je tiens à remercier Ana Debenedetti, Directrice de la Fondation Bemberg et ancienne conservatrice au Victoria and Albert Museum de Londres, d’avoir partagé avec moi les clefs de cette exposition. Grâce à sa disponibilité, j’ai pu explorer, pièce après pièce, ce que le bijou dit de la Renaissance et peut-être de nous-mêmes.
C’est à Toulouse, au sein de l’hôtel d’Assézat, que la Fondation Bemberg célèbre cette année une double actualité. D’un côté, le trentième anniversaire de son musée renové; de l’autre, un dialogue inédit avec le musée national de la Renaissance – Château d’Écouen. De cette rencontre naît une exposition remarquable D’or et d’éclat. Le bijou à la Renaissance.
Un titre qui dit l’essentiel sans dissimuler l’ambition d’une relecture. Car ici, le bijou Renaissance n’est pas réduit à sa seule fonction décorative. Il devient un objet d’étude, inscrit dans une époque où l’art, le pouvoir et le commerce s’entrelacent.
À la Renaissance, tout bijou est signe. Il dit l’alliance, le rang, la foi. Il protège, soigne, relie. Chaque motif, chaque pierre, chaque émail témoigne d’un usage précis, souvent chargé d’affects ou de vertus supposées. Dans une époque encore marquée par l’instabilité des croyances et des pouvoirs, le bijou opère comme un point d’ancrage. Porté sur soi, il agit comme un talisman autant que comme une déclaration.

Pendant en forme de Cupidon
Pays-Bas ou Allemagne, vers 1590-1620
Or émaillé, rubis, diamants, perles, H. 8,6 ; l. 4 cm
Écouen, Musée national de la Renaissance – château d’Écouen, inv. E.Cl. 20545
Photo © GrandPalaisRmn (musée de la Renaissance, château d’Ecouen) / Mathieu Rabeau
L’exposition met en valeur cette polysémie. Des mains enlacées sur une bague de fiançailles aux figures mythologiques d’un pendentif maniériste, on assiste à une véritable conversation entre les arts. Le bijou s’inspire des grandes questions plastiques de son temps : comment représenter le mouvement, comment inscrire l’humanité dans la matière, comment faire dialoguer l’ornement et le sens.
Loin d’un simple inventaire d’écrins oubliés, le parcours fait aussi apparaître les échos entre hier et aujourd’hui. Au XIXe siècle déjà, artistes et collectionneurs redécouvraient ces parures et s’en inspiraient. À l’heure où le bijou contemporain interroge à nouveau son rôle, sa portée, son message, cette exposition résonne avec une actualité silencieuse mais persistante : celle de l’objet habité.
Le bijou, dans sa matérialité autant que dans sa symbolique, est ainsi le témoin d’un basculement intellectuel profond. Avec la Renaissance naît un regard neuf sur l’homme et sur le monde. Les humanistes affirment la liberté de pensée, valorisent l’étude critique des textes et bousculent les dogmes établis. Dans ce climat d’émancipation, le bijou devient plus qu’un artefact : il est un fragment de réflexion porté à même la peau.
Au creux d’un anneau, sur la surface d’un camée, l’on devine une pensée incarnée, une croyance subtile, une science en miniature. Le savoir-faire joaillier de la Renaissance témoigne alors de cette volonté d’inscrire la beauté dans l’intelligence, et l’intelligence dans le geste.
En redonnant vie à ces joyaux de la Renaissance, l’exposition éclaire un moment fondateur où le bijou, fruit d’un savoir-faire virtuose, incarne un monde en quête de beauté, de sens et d’émancipation.
Exposition D’Or et D’Éclat Le Bijou à la Renaissance Jusqu’au 27 juillet 2025
Fondation Bemberg, Hôtel d’Assézat, Toulouse